L’apprentissage est également une part majeure de ma vie professionnelle. Dans mon métier, je suis amené à devoir comprendre rapidement des problématiques liées à des domaines souvent très techniques et très différents. Ma rapidité de compréhension et de rétention est primordiale pour mener à bien et dans les temps les missions qui me sont confiées.

Beaucoup de créateurs sont d’abord des curieux. Poussés par une soif d’apprendre, ils recherchent, ils démontent, ils remontent, ils essaient,… La création n’est qu’un sous produit ou un résidu de cette exploration. Je sais que c’est mon cas. J’adore apprendre de nouvelles choses et j’ai toujours envie de tout savoir et de tout essayer.

Or, je suis souvent déçu de la durée qui m’est nécessaire pour apprendre de nouvelles techniques ou appréhender de nouveaux domaines de connaissance. J’ai par exemple  passé des jours à apprendre la guitare (depuis 10 ans) sans pour autant me sentir aujourd’hui à l’aise et en capacité de créer dans ce domaine. Autre frustration. Je me rend compte que j’oublie très rapidement des gestes ou des savoirs que je maitrisais pourtant.

J’ai donc cherché à comprendre comment fonctionnaient mes capacités d’apprentissage et de rétention et comment en tirer le meilleur parti.

En m’intéressant à ce qu’on appelle le meta-apprentissage ou l’art d’apprendre à apprendre j’ai découvert Scott H. Young, certainement un des animateur les plus actif du domaine. Écrivain, coach et enseignant, il cherche à maîtriser et explorer le sujet depuis une dizaine d’années. Il met en pratique ses recherches au travers de projets très ambitieux. Il a par exemple tenté de compléter le cursus de 4 ans d’informatique du MIT ou d’apprendre 4 langues étrangère très différentes en moins d’un an.

Après plusieurs livres sur le sujet, principalement orientés vers les étudiants, Ultralearning vise une audience plus large et est une synthèse de toutes ses années d’étude et d’expérimentation. Pour ce livre, en plus de son expérience personnelle, Scott a étudié les techniques et les méthodes de ce qu’il appelle des « ultralearners ». Des individus qui, comme lui, on décidé d’optimiser leur apprentissage. Certain sont des élèves dont il détaille le parcours. D’autre sont des exemples historiques : Van Gogh, Da Vinci, Benjamin Franklin,… Il prend également comme exemple des contemporains plus ou moins célèbres : Nigel Richards (multiple champion du monde de scrabble, en anglais et français), Mike Tyson, Ken Jenning (plus grande somme totale gagné dans le monde des jeux culturel télévisé, 3 600 000$, 74 victoires consécutives à Jeopardy).

De ces études, Scott H. Young retire 9 grands principes qu’il a retrouvé dans la pratique de la plupart de ces ultralearner. Il croise ces expérience pratique avec des publications scientifiques sur le sujet qui éclairent et expliquent pourquoi ces mécanismes sont si utiles.

Les 9 clefs de l’apprentissage efficace

1.Meta-apprentissage

Premier principe utilisé par la plupart des ultralearners, le méta apprentissage consiste justement à se poser un cadre et des bases autour d’un apprentissage considéré de manière active et consciente. Scott H. Young constate que la plupart des ses cas d’étude ont une idée très claire de ce qu’ils veulent apprendre (quoi), de la raison pour laquelle ils veulent l’apprendre (pourquoi) et de la stratégie qu’ils vont employer pour y arriver (comment).

Même si les sujets, les objectifs et les stratégies sont différentes pour chacun, les ultralearner explicitent clairement ces trois éléments.

2.Concentration

Les ultralearners font tous preuve d’une capacité et d’une volonté de concentration importante pour mener à bien leur projet.

Scott H. Young détaille différentes stratégies employées pour entrer dans un état de concentration et s’y maintenir.

Il fait une distinction intéressante entre des moment de concentration « froide » ou le sujet est détendu et cherche à s’isoler de tout stimulus extérieur (ou à les ignorer) et une concentration « chaude » ou au contraire il peut être très actif et en interaction avec des sources multiples. La concentration froide étant idéale pour les taches complexes ou le résultat est important alors que la concentration chaude permet d’enchainer un ensemble de tâches simples ou de ce mettre dans un mode d’exploration ou de génération d’idées.

3.Adéquation apprentissage/application (directedness)

Scott H. Young remarque que les ultralearners cherchent le plus possible et le plus tôt possible dans leur apprentissage à se confronter à la tache qu’ils veulent maîtriser. Par exemple, une personne souhaitant apprendre à faire des jeux vidéo devrait directement se lancer dans la création de son propre jeu plutôt que d’apprendre à coder en C++.

Se faisant, on limite les difficultés liés à ce qu’on appelle, en apprentissage, le transfert c’est-à-dire le passage d’une activité acquise dans un contexte d’apprentissage (dans une salle de classe typiquement) à la même activité réalisée dans le monde réel.

Cela permet également de ne pas perdre de temps à apprendre des choses qui ne seront pas directement appliquées et qui risquent fort d’être inutiles ou oubliées rapidement.

« The easiest way to learn directly is to simply spend a lot of time doing the thing you want to become good at »

– Scott H. Young

4.Exercice (Drill)

Autre particularité des ultralearners, il pratiquent régulièrement et avec une attention soutenu des exercices particuliers en rapport avec un élément précis de leur apprentissage. Cette pratique peut être vue comme contradictoire par rapport à la précédente. Les deux sont bien complémentaires. Le but de ces exercices est de se focaliser sur un point faible ou un aspect  primordial d’un apprentissage afin de le maîtriser complètement. Concrètement, un basketteur apprendra beaucoup en jouant le plus possible de matchs, mais il devrait également pratiquer des séquences particulières de lancer franc.

On retrouve ici la notion de deliberate practice mise en avant par le golfeur Ben Hogan.

5.Remémoration (Recovery)

Une des meilleure méthode pour se remémorer durablement les choses est simplement d’essayer de se les rappeler. Plusieurs études on démontré cela et il semble que ce phénomène soit bien connu des expert de la mémoire.

Si vous essayez de vous rappeler ou de tester vos connaissance sur un sujet , que vous retrouviez ou non la réponse, celle-ci sera mieux mémorisée et de manière plus durable.

Les chercheurs ont montré que, à temps passé équivalent, cette stratégie était meilleure pour retenir le contenu d’un texte que de le relire, de le résumer ou de le représenter de manière visuelle.

6.Feed back

Le feed-back est évidemment un élément primordial pour l’apprentissage. Scott H. Young souligne le fait qu’il peut être de qualité différente et distingue trois niveau de feed-back:

Niveau 1: Résultat global – Seul le verdict est connu sans plus de détail. Cela peut être une note à un concours ou l’examen du permis de conduire par exemple où le candidat à le résultat sans savoir quelles ont été ses erreurs ou si il en a commis.

Niveau 2: Mise en évidence des erreurs – l’apprenant sait ce qu’il a fait de correct ou non, mais pas ce qu’il aurait du faire. C’est ce qu’il se passe par exemple lorsqu’on parle une langue étrangère et qu’on remarque à la tête de notre interlocuteur qu’il ne comprend pas une certaine phrase. C’est aussi le feedback qu’à un programmeur lorsque son compilateur lui indique une erreur à une certaine ligne.

Niveau 3: Correction – C’est le feed-back le plus riche. L’apprenant, en plus de comprendre ses erreurs est informé de la bonne réponse, ou de la bonne manière de faire. Mieux, il peut être guidé vers la meilleure façon de ne plus faire cette erreur.

Evidemment, il faut essayer d’avoir le plus de feed back possible et un feed-back de la plus haute qualité possible pour progresser.

Scott H. Young évoque également des études de chercheurs qui se sont intéressés au meilleurs délais pour le feed-back (immédiat ou différé). Même si les résultats des études sont contradictoires et ne semblent pas pouvoir démontrer qu’il existe une meilleure solution, l’expérience de l’auteur le pousse à suggérer un feed-back le plus rapide possible dans la plupart des cas.

7.Mémorisation

Les différentes techniques de mémorisation étaient au cœurs des précédent livres de Scott H. Young. Ici il se contente de noter que la plupart des ultralearner utilisent des méthodes classique de mémorisation (mnémotechnique, palais mental, répétition espacé,…).

Il s’intéresse par contre au mécanisme de la mémoire mis en évidences par les scientifiques. Il souligne notamment que l’oubli est inévitable (Il est même nécessaire à l’apprentissage) et met en avant les techniques permettant de le limiter.

8.Intuition

Ici l’auteur se concentre sur une étude de cas particulier qui est celle du physicien Richard Feynman. Il relève le fait que Feynman était réputé pour son intuition et cherche à démontrer que cette intuition était lié à une ouverture d’esprit et à une capacité d’apprentissage importante. Il détaille ensuite les différentes techniques de Feynmann et notamment celles qui permettent de se prémunir du biais d’illusion de connaissance (effet Dunning-Krugger) qui consiste à croire que l’on comprend bien un sujet ou qu’on le connait bien lorsqu’il est expliqué alors qu’on aurait été incapable de l’expliquer par nous même.

Feynman avait notamment l’habitude de reformuler des concepts ou des principes physique en partant d’une feuille blanche et sans recours à des sources, de manière à s’assurer qu’il les comprenait bien et n’avait pas simplement l’impression de les connaitre.

9.Expérimentation

Ce chapitre est également principalement dédié à un exemple illustre qui est celui de Vincent Van Gogh. Scott H. Young, en s’appuyant largement sur la biographie de Steven Naifeh, explique comment Van Gogh, dans les dernières années de sa vie dédiées à l’art, n’a eu de cesse de tester et d’explorer différentes techniques et différents médium à travers un apprentissage rigoureux. Pour lui, l’expérimentation est la clef qui a permis à Van Gogh de trouver l’envie d’apprendre. C’est cette envie qui l’a mené à la maîtrise de la peinture (entre autre) et l’a poussé à proposer des œuvres radicalement nouvelles et influentes.

Conclusion

Le livre est facile à lire car bien organisé et clairement écris. Il n’en reste pas moins très complet et intéressant d’un point de vu théorique même pour des gens familiers avec le sujet. Tout est fait pour que les notions évoquées soient directement applicables : les exemples sont nombreux et variés et chaque chapitre se termine par des méthodes pour mettre en œuvre les concepts évoqués. Sa principale qualité pour moi est qu’il est extrêmement inspirant notamment par le nombre et la diversité des apprentissages et des apprenants cités en exemple.

Il se termine par un guide pour se lancer dans son propre projet d’Ultralearning. Même si vous n’avez pas envie de vous lancer, sa lecture donne une furieuse envie d’apprendre de nouvelles choses, en plus des clefs pour le faire au mieux.

Je ne peux que le conseiller à tout ceux qui aiment apprendre des choses nouvelles, qui enseignent ou qui sont intéressés par la mémoire ou l’apprentissage de manière générale.

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